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Muni d'une caméra, je m’invite dans un lieu insolite et lointain qui est le Moyen -Age.

Je veux voir de mes propres yeux, la vie arrogante qu'avaient les châtelains lorsqu'ils faisaient bombances. Dans leurs châteaux, justement ce jour, une fête se prépare et un brouhaha incessant règne en maitre dans ce lieu.
Face à moi, des tapisseries ornent une partie des murs de pierres brutes, qui s'humidifient par le froid glacial de la pièce exagérément grande.

Tout au fond une immense cheminé, malgré les demis troncs dans son antre ne permet pas de chauffer celle-ci. Il faut dire que les fenêtres ornées d'étain laisse passer le vent, qui fait tournoyer les lustres accrochés à des chaines, ils paraissent minables car la lueur des lampes est faible et par endroit, elle dessine les silhouettes des cuisinières qui s'affairent autour des marmites.

Une table centrale et interminable taillée dans le chêne est parée de vaisselle en fine porcelaine, qui semble me convier au festin. Des bahuts dispersés ici et là, servent de support aux gros chandeliers qui prendront place sur la table pour éclairer les convives le moment venu. Tout autour des chaises sculptées et très hautes, sont toutes recouvertes de peaux de bêtes chassées peut-être par leurs aïeuls, et qui j'en déduis serviront pour réchauffer les seigneurs.

Ce qui m'intrigue, ce sont ces lourdes tentures pourpre qui masquent les entées dont chacune est gardée par les soldats du roi. J’essaie de zoomer mais rien ne se voit; de plus une idée me vient en tête, je voudrais m'engouffrer, mais je préfère les plis du tissu, comme ça je me sens camouflée. Attention… de ne pas sortir du champ de vision surtout.

Je continue à filmer sans que ma présence ne perturbe le va et vient des acteurs, je sens chatouiller mes narines par les senteurs délicates à chaque coup de cuillères en bois dans les marmites suspendue aux dessus des flammes.

Elle soulève ses fumets, dévoilant peu à peu le menu à venir. Dans le fond près de la paroi, un chevreuil accompagne deux sangliers, sur des broches suivent en cadence le bras puissant du cuisinier qui d'une main arrose d’huiles aromatisées avec les herbes cueillies la veille au potager du château.

Je vois aussi des pommes de terre cachées sous la cendre blanchie. Derrière moi un escalier mène au donjon, peut-être y aurait-il un prisonnier en train d'agoniser enchainé à une muraille, ou carrément dans une oubliette j'essaie de ne pas y penser. Dans l'arrière salle le boulanger arrange des pains encore chauds, qui s'entassent dans des paniers tressés par le vannier du village et reconnu par la cour. Bientôt le vin sera tiré des fûts de chênes et versé dans des carafes de cristal, qui feront chanter les verres et à leur tour griseront tout le monde.

Pendant le repas, la cour ordonnera alors, l'entrée des troubadours et des danseuses, avec leurs tambourins tourneront autour des seigneurs pour recevoir quelques restes de nourritures. Je regarde le déroulement de ce film inédit, quand soudain le voyant devient rouge ‘’Ho non… ma caméra va s'éteindre’’.

Je me dissimule derrière ce rideau et disparais de cet univers hostile. Dommage, mais une autre fois je reviendrai filmer les petites gens qui combattent tous les jours pour pouvoir manger à leur faim. Et puis je filmerai leurs maisons avec des toits en pailles et un sol fait de terre et poussière, pendant que les châtelains chassent dans les bois, poursuivant les gibiers et écrasant potager et champs sans la moindre excuse aux pauvres paysans fatigués et malades, mais ce sera une autre histoire.

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